Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

lundi, 16 juin 2008

Eldorado

Eldorado.jpg- Les films américains à gros budget font des bruits de pétard pour montrer qu’ils sont les rois du monde.
- Les films anglais regardent une société malade dont la chaleur humaine a été vendue pour une poignée de dol… de livres.
- Les films français bavardent et balancent leurs cocoricos prétentieux à la face du monde pour montrer qu’ils existent (et que, merde, c’est quand même eux qui ont inventé, il y a plus de trente ans, la nouvelle vague !).
- Les films latinos, coups de poings, nous montrent que le monde va de plus en plus mal.

…Et puis il y a le cinéma belge, inventif, humain, chaleureux. Ils nous prennent pas la main, les Belges, pour nous remontrer le chemin de la simplicité, de la liberté. Une pointe de surréalisme pour épicer notre imagination grippée, un soupçon de délire pour sourire de nos travers, une larme d’émotion pour nous chavirer le cœur. Il y a tout dans le cinéma belge. C’est qu’ils savent de quoi ils parlent ! Enfants de Magritte, de Brel, ils nous font voyager la tête en bas. Enfermés dans une bulle de bédé, nous traversons des plaines immenses, belles comme des mains tendues vers l’humanité.
Dans le cinéma belge, il y a maintenant Eldorado que l’on peut voir au cinéma à côté de chez moi. Le film n’est pas encore sorti officiellement mais, déjà, des ondes du bonheur, portées par un bouche à oreille enthousiaste, traversent l’Adour.
Il va marcher, c’est sûr, Eldorado ! Et, parce qu’il va rester longtemps dans nos têtes et nos cœurs, il fera partie de cette belle famille. Dans la filiation de la grâce et de l’humanité, il est déjà adopté, par la femme de Gilles qui regarde passer l'iceberg jusqu’à ce que la mer monte. Adopté par les convoyeurs qui attendent  Adopté par le fils, l’enfant, Toto le héros et même par Tarzoon honte de la jungle. Adopté parce que c’est arrivé près de chez vous. Adopté par l’homme au crâne rasé
La Belgique c’est l’Eldorado du cinéma européen. L’étoile du berger qui nous montre la voie dans la nuit de l’ennui des cinémas tape à l’œil. Je vais chanter toutes les musiques de ce film, je veux le revoir, être avec les acteurs dans la voiture et rouler à travers ce tout petit pays pour des rencontres improbables, drôles, émouvantes et si belles. C’est décidé, je vais prendre la nationalité belge et apprendre à compter les « septente ». Je vais changer d’accent, apprendre la Brabançonne, me mettre au flamand et manger plus de frites avec les moules. Je veux retourner au cinéma, à Bruxelles, Lièges ou Bruges car, hier, j’ai trouvé mon Eldorado ! Parole de Rosetta.

jeudi, 12 juin 2008

mémoire dyslexique

valse ave bahir.jpgHier soir à l’autre cinéma à côté de chez moi, il y avait l’avant- première de Valse avec Bashir. J’aime bien les avant-premières. J’ai toujours l’impression d’être invitée comme une star ou une grande réalisatrice dans un festival de renommée internationale. Je m’attends à voir une haie de photographes qui m’interpellent, criant mon nom pour que je me retourne vers eux et, du haut d’un grand escalier recouvert d’un tapis rouge vif, forcément, je leur adresse mon plus beau sourire.
Bref, en marchant sous un petit crachin d’octobre, je me fais mon film tandis que mon amoureux, plus terre à terre mais néanmoins dubitatif quant à la forme du film. Il est présenté comme un documentaire d’animation, genre encore inexploité dans les salles obscures. « La forme ne doit pas occulter le fond » prétend-il tandis que je regrette de ne pas avoir mis une belle robe de princesse.
Nous sommes peu nombreux à nous présenter au guichet, les avant-premières c’est pour les curieux, les passionnés, ceux qui ont déjà tout vu dans les autres salles de la région.
Après une présentation de la directrice des programmes, nous nous calons dans nos fauteuils préférés, mes jambes sur celles de Mamour et mes mains entortillées dans les siennes. C’est qu’il n’est pas facile ce film, il faut rester bien concentré et profiter de la chaleur de l’autre pour avancer dans l’histoire. Le réalisateur Ari Folman fait une psychanalyse en direct. Il a tout oublié de la guerre qui l’a amené au Liban. Il ne sait plus où il se trouvait ni avec qui. Le film se construit lentement avec des scènes chocs autour d’un travail douloureux sur la mémoire du réalisateur. Il a peur, peur de se souvenir, peur d’avoir fait une saloperie, peur d’avoir été complice. Il veut assumer sa mémoire, il veut la retrouver. Son parcours nous mène de ses cauchemars à la réalité de la guerre. Il interroge ses concitoyens qui racontent leurs propres guerres et ainsi se remplissent peu à peu les trous noirs de sa mémoire. Les chars israéliens écrasant les voitures dans les rues étroites des territoires occupés, les jeunes soldats qui se sentent invincibles dans ces carapaces d’acier et de feu, tirant dans la nuit parce qu’il faut bien avancer.
La musique omniprésente, décalée, renforce le sentiment de malaise. C’est un film fort qui se termine sur les images douloureusement réelles de Sabra et Chatila.
Nous sommes restés jusqu’à la fin du générique, comme toujours d’ailleurs, la magnifique musique qui l’accompagne aidant à évacuer la tension. C’est long un générique de film d’animation, on voit tout de suite que du monde a bossé et, rester dans la salle, c’est une marque de respect, un remerciement pour tous les travailleurs de l’ombre du cinéma. Et nous voici récompensés car le film recommence après le générique. J’aime bien quand les réalisateurs font ça ! Quelques images en plus, comme un clin d’œil pour ceux qui restent. A par que là, c’était des scènes entières, vingt minutes de film en plus ! Un vrai bonus ! La fin du film après le générique, gonflé le type ! Même pas peur que la moitié de la salle soit déjà partie. Nous sommes à peine une dizaine de personnes quand les lumières se rallument.
La directrice de la programmation apparait, bafouillant des excuses. Désolée, toute rouge et gênée qu’elle est.
« Vous avez compris ce qui s’est passé ? » nous demande t-elle ?  « Ben non, on n’a pas compris »
« Voila nous avons reçu le film aujourd’hui et le laboratoire a mal numéroté les bobines. La fin que vous avez vu aurait dû se trouver avant le générique et non après. »
« Alors après le générique, il n’y a rien ? » « Non il n’y a rien. » Nous sommes tous un peu déçus, elle nous plaisait bien cette fin décalée, dure, un peu hors du temps, comme la mémoire du réalisateur qui revient alors qu’il pense son travail terminé.
Hier soir, en rentrant de l'autre cinéma à côté de chez moi, dans nos têtes, impossible de remettre les bobines dans l’ordre. Le film sort le 25 juin, nous retournerons donc cette fois dans l’anonymat de la foule pour le revoir dans l'ordre décidé par monsieur Ari Folman... à moins que je ne graisse la patte aux projectionnistes afin qu’il la laisse comme les privilégiés de l'avant-première l'ont vue, la fin. Et tant pis pour les impatients qui ne verront jamais les numéros de visa d’exploitation à la fin des génériques !

Chaleureux remerciements au laboratoire dyslexique qui nous a fait passer une si bonne soirée.

lundi, 02 juin 2008

Alegria, alegria !

316590053.jpgNon mais vous avez vu ce week-end pourri ! Impossible d’organiser un barbecue, une promenade en montagne ou de voir un concert en plein air. Pourtant en ces jours qui rallongent les occasions ne manquaient pas. Mais non, rien à faire, si ce n’est regarder les fleurs se noyer dans les jardins et les escargots devenir de plus en plus gros sur mes pieds de clématites amaigris. Mon amoureux et moi avons donc décidé de quitter nos pyjamas à 19h et sans trop regarder le programme nous avons filé au cinéma.

Nous sommes sages au cinéma, on s’assoie dans la première rangée, sur nos sièges préférés, bleu pour lui, rouge pour moi et on attend gentiment que la séance commence. J’avais tout de même comme un doute, nous avions jeté notre dévolu sur le film « Maradona par Kusturica ». Il se trouve que j’ai vu, cette année, le plus mauvais film de ce réalisateur d’habitude si prolixe et imaginatif. Mais là, franchement, « Promets-moi » était une grosse daube (insulte suprême), vulgaire, lourdingue, assourdissante. Bref, un réalisateur peu inspiré tournant en rond dans un film plagié par lui-même. Quant à Maradona, comme tout le monde le sait, c'est un joueur de foot, très très connu, argentin et drogué. Je n’en savais pas plus sur cet homme, le foot n'étant pour moi qu'un ersatz ramolli et tronqué du beau jeu de rugby.

J’attendais donc que la séance commence, avec un à priori  peu favorable pour l’heure et demi qui devait venir. Les lumières s’éteignent et, après un petit coucou au projectionniste, je me cale sur mon siège pour cette petite aventure. Le cinéma c’est toujours une petite aventure, on ne sait pas où l’on va ni avec qui.

Et bien merci pour ce voyage Monsieur Emir Kusturica, merci pour cette rencontre, humaine chaleureuse, avec cet homme reconstruit, charismatique, dieu vivant dans son pays, éveillé aux problèmes du monde, révolutionnaire passionné, un vrai leader, adulé par tous les petits, les sans grades. Une religion a lui tout seul, cet homme ! Mais c’est d’abord une rencontre entre deux hommes admiratif l’un pour l’autre, avec des regards brillants comme des étoiles. C’est plein d’humour et de rencontre, comme ça, simplement, au coin d’une rue. Tous les bonheurs des hommes sont dans ce film. Et la main gauche de Maradona, ah la main gauche ! Mais si cet homme avait joué au rugby, l’Argentine serait championne du monde, c’est sûr ! Nous avons applaudi à la fin du film, comme des enfants devant Charlot ou Kirikou. Dommage que nous ne sachons pas danser le tango, mon amoureux et moi, sinon c’est certain, nous commencions quelques pas pour sortir de la salle. Après, on a pris l’apéro : il fallait bien fêter ça !

Alors si, comme moi, vous n’aimez pas le foot, courez vite voir ce film ! Si vous l’aimez, allez y aussi ! On voit quand même des buts et des beaux en plus. Un petit avertissement tout de même, pour les crétins avinés, installés dans les virages des stades et enrubannés de banderoles racistes, ce film n’est pas pour vous, car il parle d’amour et d’humanité, des valeurs avec lesquelles vous vous essuyez les pieds. C’est trop sensible, trop intelligent, c’est sûr, vous allez vous ennuyer !